par Prof. LOHATA TAMBWE Okitokosa Paul-René, KIBISWA Naupess, OKONGANDJOVU Lombela
En général, l’histoire de l’administration de notre pays est caractérisée par la domination des autorités centrales sur les autorités locales : malgré le système régionaliste en vigueur dans le pays colonisateur, la RDC est un Etat unitaire et hyper centralisée. Nombre de facteurs permettent d’expliquer cet état de choses, parmi lesquels on peut retenir le poids de la colonisation, l’institutionnalisation du parti unique et de l’idéologie de l’authenticité, la personnalisation du pouvoir ainsi que le poids encore de forces centrifuges qui défavorisent la construction d’un Etat moderne et centripète :
1° Le poids de forces centrifuges
La RDC comme nombre de pays du Tiers-Monde et d’Afrique Noire est confrontée, tous les jours aux forces centrifuges, l’Etat y précédant la nation : Il est difficile d’unifier et de décentraliser à la fois le territoire. La RDC a connu plus d’une fois la violence due aux forces centrifuges notamment entre 1960 et 1965 et entre 1998 et 2003, lesquelles ont entraîné respectivement la fragmentation du pays en quatre ( le Katanga, le Sud-Kasaï, l’Est du Congo et Léopoldville ) et en 6 Etats centrifuges ( territoire occupé par le RCD/Goma ; territoire occupé par le M.L.C ; territoire occupé par le R.C.D K.M.L ; territoire occupé par les Maï-Maï; territoire occupé par le RDC N ainsi que le territoire sous contrôle du gouvernement central de Kinshasa ).
Les responsables politiques (Elite modernisante) ont utilisé et fabriqué le fait ethnique pour accéder ou se maintenir au pouvoir. Bref, le pouvoir central a perdu toute emprise sur les entités locales. Pour ne pas tomber dans le piège du discours officiel qui a exploité politiquement cette situation au cours de la deuxième république, il convient de noter que d’autres éléments ont influencé l’adoption de la centralisation administrative ;
2° La personnalisation du pouvoir
Celle-ci est révélée par l’accroissement des pouvoirs au profit du président à travers notamment :
a) La constitution de 1967, plusieurs fois modifiée ;
b) Le discours officiel de l’authenticité : celle-ci soutient que dans le contexte de la tradition africaine, le chef de l’Etat détiendrait tous les pouvoirs. Dans ces conditions, la gestion entière du pays devrait se réaliser au centre ; même les chefs de l’Etat anti-Mobutistes partagent inconsciemment cette affirmation ;
3° Le poids du passé colonial
On sait que les institutions administratives coloniales ont été très centralisées, toutes les autorités centrales (à l’exception du gouverneur général) vivaient à Bruxelles et dirigeaient le Congo belge à partir de là. Elles ont donc influencé les structures administratives de la deuxième république notamment. Comme le retiendrait G.Timsit, les institutions coloniales servent de « facteur multiplicateur » dans les pays du Tiers – Monde. Cette influence a été manifeste et consciente lors de la deuxième république : MPINGA Kasenda n’a-t-il pas écrit qu’en raison de l’efficacité dont aurait fait preuve lesdites institutions coloniales, la constitution d’un Etat fort et unitaire passe par elles. Il a ainsi encouragé le régime Mobutu qui s’en est inspiré. Il est fort surprenant de constater que ce genre de position ait été prise par un grand idéologue de l’authenticité, idéologie officielle du régime.
Compte tenu de ces facteurs, la RDC est-elle décentralisable ?
La décentralisation dans ces conditions, n’est possible et viable que sous certaines conditions :
- éducation politique et formation d’une conscience nationale ;
- promouvoir l’initiative privée et doter les entités de base des moyens conséquents : la constitution de la 3ème république a préconisé la retenue des 40% à la source en lieu et place de la rétrocession ;
- démocratisation approfondie de la vie politique locale (recours à l’institution du référendum) ;
- rupture avec la tradition coloniale ;
- la rationalisation de la gestion de la chose publique.
On verra successivement l’administration centrale (I) et les administrations locales (II), avant de passer à la conclusion générale (III).